Coup de foudre

Il était pressé ce jour-là, il était très pressé, la pluie qui n'avait pas cessé depuis plusieurs jours le déprimait encore un peu plus.  Sa vie s'écoulait, monotone et sans passion. Son amour était parti hier. Elle était partie et il avait l'impression de l'avoir abandonnée. Rien ne pourrait la remplacer, rien, jamais. A l'angle d'une rue, un passant le bouscula et s'éloigna sans même s'excuser, il s'apprêtait à le rattraper pour … et c'est là qu'il la vit. 

Combien de temps était–il resté, immobile, à la regarder, à l'admirer, à la découvrir. Ses formes courbes incitaient à la caresse mais il devait se contenter d'abord de la regarder. Sa ligne élégante la rendait fascinante. Elle avait pourtant cette touche d'audace qui suscite le désir, l'envie de possession, un besoin de la prendre en douceur ou au contraire avec sauvagerie. Quelque chose lui disait que cette belle serait, elle aussi, sauvage, elle avait la grâce féline du fauve  qui dissimule sa puissance sous un manteau d'harmonies gestuelles..

 

Sans y être invité, il entra pour se rapprocher d'elle. Elle était là, à portée de main, mais il hésita encore avant de la toucher  comme un amant timide qui craint d'effaroucher son aimée. Quelqu'un s'approcha, on lui présenta sa belle, ses qualités, ses infimes défauts étaient passés semble-t-il sous silence. Il demanda : « je peux ? »  Il n'attendit pas la réponse déjà il partait avec elle. Tout se passa ensuite très vite, à peine entre ses mains elle s'abandonna à lui comme aucune autre avant ne l'avait fait. Elle répondit à chacune de ses avances mieux encore qu'il n'aurait osé l'espérer.

Son ronronnement d'abord puis son feulement quand il vint à bout de ses dernières résistances le pénétrèrent comme seule la passion peut vous envahir. Il continua, il accéléra de plus en plus jusqu'à ce que ses vibrations à elle se fondent avec les siennes. Le bonheur de la griserie, cet espèce d'état second  qui, au lieu d'anesthésier les sensations ne fait au contraire que les exacerber, envahit peu à peu tout son être.  Il avait l'impression d'être le maître de sa vie et le maître du monde aussi .  

 

Quand il la raccompagna, il eût une dernière caresse qui voulait dire, je reviendrais ma belle et tu seras à moi.

« Monsieur, désolé, mais on ferme ! » 

Il sortit mais il savait que demain il serait là et que cette fois il enlèvera vraiment sa belle.

Avant de partir il se retourna une dernière fois et, un à un,  il vit s'éteindre les panneaux : Kawasaki, Suzuki, Ducati, Honda, Triumph … 



20/01/2010
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